Prélèvement à la source : où en est-on ?

Où en est-on de la mise en place de ce dispositif ? Les entreprises artisanales sont-elles en retard ?
Le prélèvement à la source est un dispositif qui va permettre à l’Etat de collecter l’impôt sur le revenu (IR) de chaque contribuable au moment de la perception du revenu et non plus l’année suivante comme c’est le cas actuellement. C’est le système de la Déclaration Sociale Nominative (DSN), en cours d’implémentation dans toutes les structures (la phase 3 a été mise en place sur le premier semestre 2017), qui va permettre aux entreprises de récupérer les éléments fournis par l’administration fiscale afin de collecter l’impôt sur le revenu pour le reverser à l’Etat.
Concrètement, l’administration va calculer pour chaque salarié son taux d’imposition en fonction des revenus de son foyer. Le taux dépendra du niveau de salaire. Si le salarié a d’autres revenus en plus de son salaire, il devra alors choisir entre un taux calculé en fonction de l’ensemble de ses revenus ou un taux fixé à partir de son salaire uniquement, le second choix lui permettant de conserver la confidentialité de ses autres revenus.
L’entreprise récupèrera alors ce taux, ou le taux standard en l’absence d’information (si le salarié vient d’arriver dans la société par exemple) et collectera le montant d’impôt lié aux salaires du mois en cours directement sur le bulletin de paie. Ensuite, elle versera cette somme au Trésor Public, comme elle le fait déjà pour les cotisations sociales auprès de l’URSSAF et des autres caisses.
Début 2019, les salariés recevront une déclaration d’impôt intégrant les montants déjà payés sur 2018. Ils déclareront alors leur impôt comme c’est le cas actuellement, en ajoutant leurs crédits d’impôts éventuels (dons, travaux,…).
Toutes les entreprises qui sont passées à la DSN en 2016 ne sont donc pas en retard.
Comment cela va-t-il se passer pour les artisans exerçant en individuel ?
Pour eux, l’acompte à verser sera calculé sur la base du dernier revenu connu. Le principe de calcul sera comparable à celui des cotisations RSI. Début 2018, l’acompte d’impôt correspondra au revenu 2016 déclaré en juin 2017. Une fois la déclaration 2017 déposée (à priori en juin 2018), l’acompte sera calculé sur la base des revenus 2017. Si le résultat est déficitaire, l’acompte sera nul. Enfin, pour ceux qui sont dans des régimes forfaitaires (micro-BIC), l’acompte tiendra compte de l’abattement forfaitaire.
Le taux utilisé sera celui mis à disposition par l’administration fiscale sur l’avis d’imposition.
Une fois la déclaration de revenus envoyée, un complément d’impôt sera à payer avec étalement systématique si le solde dépasse 300 €. En cas de crédit, il sera automatiquement restitué.
Et pour les gérants majoritaires non salariés ?
Les gérants majoritaires relèvent d'un régime spécial au regard de l'impôt issu de l'article 62 du Code général des impôts mais ils ne sont pas moins imposables dans la catégorie des traitements et salaires. Ils sont ainsi assimilés à des salariés, même s’ils n’ont pas de bulletin de paie. Pour le moment, ils devraient donc a priori être prélevés de la même manière que les salariés sous forme d’acompte mensuel, sur la base de la rémunération versée.
Pourquoi parle-t-on d’"année blanche" 2017 ?
Pour 2017, les impôts à payer en juin 2018 bénéficient d’un Crédit d’impôt spécial, le CIMR (Crédit d’impôt de la modernisation du recouvrement). Il permettra aux contribuables de ne pas payer à deux reprises l’impôt sur 2018. L’impôt de 2017 ne sera donc jamais payé, d’une certaine manière.
Pour éviter que les contribuables ne déclarent de trop fortes rémunérations en 2017 pour bénéficier de l’effet d’aubaine, l’administration a tout prévu. Le CIMR sera calculé pour les revenus non exceptionnels uniquement, et à partir d’une moyenne des bénéfices passés pour les indépendants.
Voici un exemple concret :
Un individuel a les revenus suivants
2014 : 40K€ 2015 : 50K€ 2016 : 60 K€ 2017 : 70K€
Le revenu non exceptionnel à retenir pour 2017 s’élèvera à 60 au lieu de 70 (plus faible entre 70 et 60)
Si le revenu 2018 s’élève à 80K€ : complément de CI de 80-70 = 10
Si le revenu 2018 s’élève à 50K€ : 50<60 donc pas de complément de CI
Si le revenu 2018 s’élève à 65K€ : complément de CI de 65-60 = 5
Pour optimiser et bénéficier au maximum du crédit d’impôt, il faudra donc avoir une rémunération à la hausse entre 2017 et 2018. Si elle est à la baisse, mieux vaut qu’elle soit supérieure à celle de 2016.
Comment l’anticiper lorsqu’on est artisan, patron d’une toute petite structure ?
Le tout est de s’assurer, si l’on a des salariés, que la DSN est bien mise en œuvre complètement. Pour le reste, et notamment la récupération des taux d’imposition, l’administration va communiquer à partir de juin 2017 et devrait transmettre les éléments nécessaires avec les déclarations de revenus et la DSN.
Existe-t-il des outils concrets pour s’organiser ?
Il faudra que les artisans s’assurent que la personne en charge de la déclaration des cotisations sociales a bien tous les éléments nécessaires pour la mise en place du prélèvement. Il n’y pas besoin d’outil particulier. Il faut juste un bon expert-comptable pour calculer l’acompte correct pour l’indépendant afin de prélever et de reverser le bon montant d’impôt pour chaque salarié !
Jean-François Cottin est associé expert-comptable et Commissaire aux comptes au cabinet Crowe Horwath - Fideliance. © Fideliance
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