Prorogation de l’état d’urgence sanitaire : jusqu'au 10 ou jusqu'au 24 juillet ?

Publiée au Journal officiel du 24 mars, la loi instaurant un "état d’urgence sanitaire" apportait un cadre légal au régime d’exception en place depuis le 16 mars. Le Gouvernement a décidé, eu égard à la situation épidémique en France, de proroger jusqu’au 24 juillet ce texte applicable initialement pour une durée de deux mois. S’il a été voté par l’Assemblée nationale, les sénateurs ont écourté le délai, pour ne valider la prolongation de l’état d’urgence que jusqu’au 10 juillet.
Quelques nouveautés viennent compléter les dispositions précédentes.
La quarantaine toujours en discussion
Le texte initial permettait au préfet de placer en quarantaine et de maintenir à l’isolement les personnes entrant sur le territoire national, sur proposition du directeur général de l’agence régionale de santé (ARS). Les sénateurs ont pris la main et, au terme d’un long débat, ils ont proposé un amendement relatif à l’isolement des personnes infectées par le Covid-19.
Pour l’heure, ces mesures sont fixées à quatorze jours. Elles ne pourront concerner que "les personnes qui entrent sur la partie continentale de la France, en Corse, ou dans les collectivités d’outre-mer, et qui ont séjourné au cours du mois précédent dans une zone de circulation de l’infection". Le ministre de la Santé, Olivier Veran, mise sur ce point sur le sens des responsabilités des Français.
Pas de tracing mais des fichiers traceurs
Le désormais controversé article 6 devait être examiné, ce mardi 5 mai, en séance publique au Sénat. Il prévoit la création d’un "système d’information", dont le seul but est d’identifier les personnes infectées ou susceptibles de l’être, ainsi que leurs contacts, afin de remonter les chaînes de contamination. Fini, pour le moment, l’application StopCovid qui n’est pas opérationnelle pour l’heure. Le Gouvernement travaillera sur la base d’un fichier. Il pourra, en outre, s’appuyer sur les données existantes de l’Assurance-maladie. Le projet de loi comprend une habilitation du Gouvernement à prendre, par voie d’ordonnances, toutes les mesures nécessaires à l’organisation de ces systèmes d’information. L’ensemble des éléments personnels collectés ne pourra en aucun cas servir une application informatique ultérieure.
Plus d’agents verbalisateurs et de restrictions des déplacements
Le texte prévoit également l’extension des catégories d’agents habilités à constater la violation des mesures de confinement. Les agents assermentés de la SNCF et de la RATP pourront par exemple dresser les PV pour ces infractions, tout comme les réservistes et les adjoints de sécurité.
Le projet de loi donne au Gouvernement la possibilité de compléter la réglementation des déplacements et des transports, mais également de décider, ou non, de l’ouverture des établissements recevant du public et des lieux de regroupement de personnes. Les pouvoirs de réquisition des personnes, des biens et des services nécessaires à la lutte contre l’épidémie sont également clarifiés.
Une immunité pénale
"Nul ne peut voir sa responsabilité pénale engagée du fait d’avoir, pendant la durée de l’état d’urgence sanitaire, soit exposé autrui à un risque de contamination, soit causé ou continué à causer une telle contamination." Le texte aménage favorablement le régime de la responsabilité pénale des employeurs, des élus locaux et des fonctionnaires amenés à prendre des mesures pour la sortie du confinement. La peur de procès futurs plane sur le projet de loi. Il ne s’agit toutefois pas d’un blanc-seing, la responsabilité des décideurs pourra être recherchée si les mesures ont été prises intentionnellement, par imprudence ou par négligence. Les sénateurs ont largement donné leur accord à cet article.
Précisons que ces votes des assemblées ont une valeur symbolique, puisqu’ils ne remettent pas en cause le processus gouvernemental de déconfinement. Passé le cap du Sénat, direction l’Assemblée nationale, pour une adoption définitive du texte avant la fin de la semaine.
- Connectez-vous ou inscrivez-vous pour publier un commentaire