Prestige

Au rythme des mains de fée

Le 27/10/2017
par Julie Clessienne
À Écouen-Ézanville (95), le Musée national de la Renaissance n’est pas le seul chef-d’œuvre du patrimoine dont on s’enorgueillit fièrement. Les tampons pour instruments à vent de l’entreprise Chèdeville-Lelandais, dirigée par Michel Ryckeböer, reconnus pour leur qualité par les musiciens et réparateurs du monde entier, sont le fruit d’un savoir-faire méticuleux, jalousement préservé.
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Nouveau dirigeant, nouveau positionnement

Quand Michel Ryckeböer, alors comptable de l’entreprise, reprend Chèdeville-Lelandais en 2005, le bilan d’activité fait grise mine. Diversification tous azimuts, choix des matières premières négligé, service client inexistant sont autant de bémols qui ont entaché la partition en 80 ans d’activité.

« Nous étions alors en perte de vitesse. J’ai décidé de me recentrer sur une seule activité – les tampons – et de trouver de nouveaux fournisseurs de matières premières (cuir, feutre et carton) pour aboutir à un produit parfait, vraiment plus haut de gamme », indique-t-il.

Comme un joint d’étanchéité

Et un bon tampon, c’est aussi peu onéreux (entre 1 et 1,50 euro) que primordial ! Comprenons de quoi l’on parle : le tampon est formé d’un petit disque de feutre collé sur du carton puis habillé d’une fine couche de cuir. Composants essentiels des instruments à vent (saxophone, clarinette, flûte, hautbois, basson…), ils servent à faire le bouchage entre le corps de l’instrument et la clé, « comme un joint d’étanchéité dans un moteur de voiture, explique Michel Ryckeböer. Ils se doivent donc d’être très droits pour s’installer aisément, réguliers et de bonne facture pour résister aux contraintes telles que les vibrations ou l’humidité. »

« Il y a ceux qui vendent des tampons pour instruments à vent et il y a ceux qui, comme nous, les fabriquent avec une véritable passion », pose Michel Ryckeboër.

Une affaire de femmes

Outre des matières premières rigoureusement sélectionnées, ce qui fait la qualité du tampon, c’est avant tout sa fabrication, ici encore entièrement manuelle.

« Cela demande d’être très méticuleux, patient et concentré. Il faut en moyenne à peu près un an pour maîtriser ce savoir-faire et apprendre à rabattre avec soin et régularité la pièce de cuir sur la base en feutre. »

Une tâche confiée ici aux mains expertes de six femmes, aussi efficaces que souriantes, capables de produire 60 pièces à l’heure.

« Leur savoir-faire unique constitue la richesse de l’entreprise et se transmet entre dames depuis des décennies », conte Michel Ryckeböer.

Les réparateurs comblés, Yamaha séduit

Un process de fabrication très bien pensé, un parc de machines « vintage mais efficace »… En douze ans et grâce aux choix judicieux de son dirigeant, Chèdeville-Lelandais est devenu une référence dans le milieu.

« Quand les réparateurs d’instruments à vent commencent à travailler avec nos produits et à les apprécier, c’est gagné pour nous ! »

Et ce positionnement haut de gamme et sur les marchés de niche (sur le hautbois notamment alors que les autres fabricants se concentrent surtout sur le saxophone) a attiré l’attention de clients prestigieux, comme Yamaha, qui a adopté les tampons Chèdeville-Lelandais après trois ans et demi de tests drastiques ! Une consécration…

Une cadence à adopter

Aujourd’hui, plus de bémols dans la partition, juste, parfois, un petit souci de cadence tant les commandes affluent du monde entier. Japon, Corée, États-Unis en ligne de mire… L’entreprise réalise 50 % de son chiffre d’affaires à l’export et produit 300 000 pièces par an dans des locaux de… 80 m2 !

« Je tiens tellement à notre manière de travailler et à la qualité de nos produits que je préfère qu’il y ait parfois un peu d’attente mais je ne vais pas tarder à embaucher pour qu’on puisse tenir le rythme ! », avoue Michel Ryckeböer.

www.chedeville-lelandais.com

Dates clés

1928 : création de l’entreprise par M. Lelandais à Ivry-la-Bataille (27), sur les bords de Seine.

1976 : rachat par M. Glotin, ajout de l’activité de fabrication d’anches d’instruments à vent, implantation à Écouen-Ézanville.

2005 : reprise de l’entreprise par M. Ryckeböer, alors comptable de l'entreprise, recentrage sur l’activité de fabrication de tampons.

2014 : obtention du label Entreprise du Patrimoine Vivant (EPV).

2017 : stabilisation du CA autour de 500 000 €/an, embauche en prévision.

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