Conjoncture

Bâtiment : vigilance de mise malgré la reprise

Le 22/03/2018
par Samira Hamiche
Emploi, mises en chantier, entretien… Si l’année 2017 a été marquée par une nette embellie dans le secteur du BTP, la Fédération française du bâtiment (FFB) met en garde contre un tassement, voire une régression de l’activité en 2018. En cause : la suppression des dispositifs incitatifs et les coupes budgétaires.
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Conférence FFB mars 2018Paris, le 22 mars 2018. Le président de la FFB, Jacques Chanut (centre), se dit très vigilant quant au "rabotage" des dispositifs d'aide au logement et à la rénovation énergétique.

La Fédération française du bâtiment (FFB) a présenté le 22 mars les chiffres de conjoncture dans le secteur du BTP, pour l’année 2017 et le premier trimestre 2018. Ces derniers confirment la reprise constatée sur le terrain par les artisans et donneurs d’ordre.

La hausse la plus remarquable concerne le neuf. En 2017, la FFB dénombre 426 000 mises en chantier. « Le cinquième meilleur score depuis 1986 », note le président de la FFB, Jacques Chanut. Cette dynamique s’est poursuivie en ce début d’année : +6,5 % de logements et +15,7 % de surfaces non résidentielles mis en chantier (glissement annuel sur 3 mois : novembre 2016-janvier 2017 à novembre 2017-janvier 2018).

Les travaux d’amélioration-entretien ont quant à eux connu une accélération fin 2017, une tendance explicable par l’anticipation de la révision du Crédit d’impôt transition énergétique (CITE). Toutefois, en ce début d’année, résume Jacques Chanut, « l’activité se tient, mais sans plus ».

Côté emploi, le ciel s’est également éclairci en 2017, avec la création nette de 31 000 postes (+2,7 %), marquée par une accélération du salariat (23 500 postes) et une baisse de l’intérim (7500 postes). Jacques Chanut souligne toutefois « la difficulté croissante à trouver des intérimaires qualifiés ». Malgré la précarité de statut, l’intérim, synonyme de prime de fin de mission et de liberté de congés, séduit de plus en plus. 

En moyenne, les coûts des salaires et matériaux ont, eux, cru de 2,5 %.

Prévisions 2018 : gare au tassement

Amorcé fin 2017, le ralentissement dans le résidentiel neuf risque de s’intensifier cette année. Le quatrième trimestre 2017 a été marqué par une baisse de 4% des ventes et de 13% des mises en vente.  En glissement novembre 2017-janvier 2018, la baisse est de 17%. Toutefois, le non-résidentiel, notamment le secteur des bureaux, reste « toujours très actif, mais concentré sur quelques villes », fait remarquer le président de la FFB.

En 2018, la FFB prévoit aussi une baisse du nombre de mises en chantier (415 000).

Sur le plan de l’emploi, l’organisation table sur une hausse de 2,6%, mais se dit inquiète des difficultés de recrutement de personnel qualifié, qui rappellent la sombre année 2008. Quelque 240 000 demandeurs d’emploi restent sur la touche, soit parce qu’ils « sont peu employables » ou « qu’ils ne souhaitent pas véritablement rejoindre le secteur », estime la FFB.


Prudence… Et budget !

Malgré l’enthousiasme suscité par les résultats de l’an dernier et les réformes en cours (apprentissage et formation professionnelle), la FFB reste sur ses gardes. Jacques Chanut se dit « inquiet » du « rognage des annonces sur le logement », citant notamment le rabotage du CITE, qui sera remplacé au 1er janvier 2019 par la « Prime Hulot ». Le budget de cette dernière sera de 900 millions d’euros, soit deux fois moins que le CITE, doté lui de 1,8 milliard d’euros. « On a le sentiment d’être stigmatisés sur ce plan-là », insiste le président de la FFB.

Ce dernier appelle le gouvernement à « maintenir les incitations à la rénovation énergétique » et à la propriété. CITE, PTZ, Pinel, Elan : « il est indispensable de maintenir ces mesures d’accompagnement, qui permettent de compenser la hausse des coûts », avertit Jacques Chanut, qui invite en outre le gouvernement à prendre des mesures sur le plan de la fiscalité immobilière, facteur de frilosité.

Sur ce point, Jacques Chanut rejoint son homologue de la Capeb, Patrick Liébus, qui présentait le même jour les résultats de l'observatoire kiWih sur les label Eco Artisan et RGE.

« Nous craignons de nous retrouver dans un climat rappelant 2011-2012, quand le marché s’est bloqué car le gouvernement rognait sur les mesures d’accompagnement des particuliers (…) Surtout, ne répétons pas l’histoire, qui n’est pas si ancienne ! », alarme le président de la FFB. 

Plaidoyer pour la fin de « l’ordre de service à zéro »

Dans le cadre des futures discussions autour du PACTE, la FFB compte militer pour la fin de l’ordre de service à zéro. Peu connu, ce système permet à des clients publics (hôpitaux notamment, et autres institutions de l’Etat) d’exiger des travaux sans chiffrage, paiement ni délai. Jacques Chanut, qui dénonce un « fait du prince », un « système ubuesque, véritable permis de tuer les entreprises », entend ainsi se faire le porte-parole des artisans auprès de Bruno Le Maire, qu'il doit rencontrer le 23 mars.

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