Artisans cherchent reconnaissance d'urgence
Presque deux ans jour pour jour après le "contrat de confiance" noué par Bruno Le Maire, que reste-t-il des promesses de Bercy ? Dans le cadre de l'assemblée générale annuelle des présidents de Chambres de métiers et de l'artisanat, l'amphithéâtre de CMA France a accueilli, mardi 25 juin, la secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'Économie et des Finances, Agnès Pannier-Runacher. L'occasion de faire le point sur les réformes en cours, d'exprimer les inquiétudes et de (re)tracer les traits d'union.
"Urgence de reconnaissance artisanale"Â
A la tribune, le président de CMA France, Bernard Stalter, a rappelé le caractère symbolique de l'échéance. "Nous sommes à  l'aube de l'acte II du quinquennat", a-t-il introduit, avant d'embrayer sur les préoccupations majeures du réseau et le bilan des premiers effets des lois Pacte et Avenir Pro.Â
Accablés de charges mais investis corps et âme dans l'apprentissage, parfois sans salaire et pourtant force de proposition, les artisans "sont prêts à travailler"... "Mais pas à n’importe quel prix : dans le respect et dans le dialogue, l’échange, la concertation", a nuancé Bernard Stalter, exhortant le gouvernement à relever "l’urgence de reconnaissance artisanale".Â
Le président de CMA France a souligné l'apport des échanges du Grand Débat de l'Artisanat, desquels ont émergé 6 priorités "vitales, car elles garantissent aux entreprises de pouvoir se développer". "Nous sommes très attachés à la notion de travail, mais il faut que le travail paye", a réclamé Bernard Stalter, à l'adresse d'Agnès Pannier-Runacher.Â
"Nos métiers sont tous créateurs d’emplois non délocalisables... La croissance ne passe pas uniquement par les grands groupes !"
Bernard Stalter
Points de friction
Sujet brûlant d'actualité, l'équilibre - menacé - du financement des contrats d'apprentissage à la rentrée 2019 a été fermement abordé. Le coût-contrat soigneusement défini par les branches pourrait en effet ne pas être appliqué partout en France et serait, par endroits, remplacé par le coût préfectoral, plus faible...
Bernard Stalter a fait part de la "colère" et de l'"incompréhension" du réseau, face à une situation "inadmissible, mortifère et dangereuse pour la pérennité de nos CFA". "Nous regrettons que la méthode de travail annoncée par le Premier ministre ne soit pas appliquée. Muriel Pénicaud a défendu notre cause, mais elle n’a pas obtenu gain de cause en réunion interministérielle". Le président de CMA France a annoncé qu'il n'hésiterait pas à  porter l’affaire devant le tribunal administratif pour "inégalité de traitement" si le coût-contrat venait à ne pas être appliqué partout. Une annonce développée le lendemain lors d'une conférence de presse dédiée.
"Est-ce que nos CFA proposent des formations au rabais ? Nous n’avons pas peur de la concurrence, mais de la concurrence déloyale..."
Parmi les autres demandes du réseau, Bernard Stalter a évoqué la limitation à deux ans du régime de la micro-entreprise, l'exonération de charges pour les premières embauches, l'accentuation des aides à la reprise d’entreprises ou encore la reconnaissance du caractère "primordial" du Stage de préparation à l'installation (SPI), que la loi Pacte a rendu facultatif...Â
Sur tous ces points, a conclu Bernard Stalter, le réseau des CMA "attend des actes et bien plus que des intentions ; nous comptons sur vous pour sensibiliser vos services à l’artisanat".Â
"Aidez nous, car on ne nous ménage pas !"Â
L'oeil attentif de Bercy
Attentive aux revendications des artisans, Agnès Pannier-Runacher ne compte pas leur "tourner le dos". Pour autant, fidèle à l'esprit d'équipe, elle n'entend pas vaciller et a fermement défendu les positions du gouvernement et de Bercy. La secrétaire d'Etat a assuré de la "bienveillance" de ses services, illustrée récemment par le déploiement de mesures pour les entreprises affectées par la crise des Gilets jaunes.
"Je suis votre ministre de l’Artisanat"
Agnès Pannier-Runacher
"Le ministère s’est mobilisé dès le 26 novembre", a-t-elle rappelé. Les aides, elles, ont été sollicitées grâce au déploiement de conseillers de Bercy in situ, qui ont su repérer les entreprises impactées. Quant aux verbatim du Grand Débat de l'Artisanat, "ils disent beaucoup de choses d’un lien qu’il faut retisser", a reconnu la secrétaire d'Etat.Â
Au sujet du SPI, Agnès Pannier-Runacher a plaidé pour la "liberté entrepreneuriale" et invite les CMA à continuer de le proposer, en accentuant leur "accompagnement au long terme".
Simplification, équité fiscale... Vers un "pacte artisanal"
La secrétaire d'Etat a annoncé le lancement d’une concertation qui pourrait aboutir rapidement (septembre ou octobre ?) à un plan spécifique à l’Artisanat. "Mon objectif est d’actionner tous les leviers qui permettront aux artisans d’améliorer leur environnement et de créer de l’emploi", a-t-elle synthétisé.  "J’aime la performance, j'aime que les gens qui s’investissent aient droit au fruit de leur travail, que ça leur revienne", a-t-elle assuré.
Entre autres pistes, il s'agirait d'instaurer l'équité fiscale pour toutes les entreprises, d'épauler les artisans dans leur transition numérique, de mieux les aider à recruter, ou encore de simplifier leurs tâches administratives... Un impératif auquel la secrétaire d'Etat est extrêmement sensible. "Un mode de fonctionnement trop rigide ne peut pas créer la confiance avec les entreprises", a ainsi admis la secrétaire d'Etat, qui souhaite "aller plus loin" dans la relation entre administration fiscale et artisans, notamment en unifiant les "process" sur tout le territoire.
Les CMA comme pépinières d'initiatives
Dans le cadre de l'AG, Agnès Pannier-Runacher a également pu mesurer la densité et de la pertinence de l'offre de services des CMA, au travers du 1er "Forum des initiatives". Inauguré par ses soins, ce village de stands a été conçu comme "un concentré" des actions menées au quotidien par les CMA dans les domaines de la formation, de l’entreprenariat, de l’économie de proximité, du numérique ou encore du développement durable.Â
La secrétaire d'Etat a en outre officialisé le nouveau nom du réseau national des CMA, "CMA France" (ex-APCMA), en dévoilant la nouvelle plaque du siège parisien situé 12 avenue Marceau.Â
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