Focus métier

Artisans à l'unisson

Le 06/12/2019
par Samira Hamiche
Malgré la multiplicité de spécialités qu’elle fédère, la facture instrumentale est unie par une philosophie : l’amour de la musique et des instruments, objets vivants habités d’une âme vibrante. Comme dans un orchestre, chaque profession veille à apporter sa pierre à l’édifice, dans l’écoute et le partage.
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A l’image d’un ensemble musical, l’univers des professionnels de la facture instrumentale est duel : solitaire dans les loges, uni sur scène. Luthiers, facteurs et restaurateurs de pianos, de vents, de percussions, fabricants d’anches, archetiers... La Chambre syndicale de la facture instrumentale (CSFI) regroupe une quinzaine de métiers et près de 2.000 entreprises, dont une majorité (88 %) sont unipersonnelles.

Si certaines, comme l’emblématique Buffet-Crampon, rayonnent à l’échelle planétaire, la plupart se font très discrètes. Ce qui les rassemble ? « Nous sommes quasi-systématiquement sur des marchés de niche : nos savoir-faire sont spécifiques, mais notre clientèle se trouve sur tout le territoire », expose Fanny Reyre, luthière en quatuor, vice-présidente de la CSFI et élue à la CMA 44. Adhérer à une organisation professionnelle permet ainsi « de se battre, de sortir de l’entre-soi »…

Passeurs de musique

Toutes spécialités confondues, les facteurs d’instruments rencontrent deux problématiques : « se faire connaître et fournir aux musiciens des instruments durables, fonctionnels ». Face à la terrible concurrence des plateformes d’e-commerce, les professionnels sont moins visibles, mais ont l’atout du qualitatif. « Nous ne vendons pas une référence de catalogue, mais un objet vivant, destiné à jouer de la musique », insiste Fanny Reyre.

De prime abord évidente, la définition d’« instrument de musique » mérite en réalité un approfondissement : « nous offrons la garantie du son, nous réparons, faisons vivre ces instruments qui, même s’ils ne sont utilisés qu’une seule fois, n’émettent que quatre notes, ont une âme ; la durée de vie de certains outrepasse largement notre vie à tous... »

« Je crois beaucoup en notre rôle de passeurs. Nous sommes là pour emmener les gens du côté de la musique, nous participons à transformer l’essai. »

Fanny Reyre, vice-présidente de la CSFI

Bois tropicaux : un CITES assoupli

L’instrument de musique, « objet culturel ». C’est à la faveur de cette définition que la CSFI a obtenu en août dernier la levée de lourdes formalités pour les fabricants d’instruments employant des bois tropicaux.

Très restrictive, la réglementation CITES imposait aux artisans un permis spécifique pour commercer à l'international. Une situation « très pénalisante pour les petites structures », témoigne Fanny Reyre, notamment pour les facteurs de clarinettes, de hautbois et de cordes frottées, tributaires du palissandre.

Trois ans d’un « pénible parcours du combattant, mené sans relâche » avec une vingtaine d’organisations professionnelles, auront permis d’obtenir gain de cause : les artisans de la facture instrumentale employant des bois tropicaux sont désormais exemptés de formalités CITES. Après transposition en droit européen, la mesure est entrée en application le 26 novembre.

Corollaire de cette victoire : la CSFI, déjà engagée en faveur de l’écologie, va renforcer ses programmes en faveur de plantations durables, notamment en Tanzanie et au Mozambique. Entre autres initiatives, l'organisation participe ainsi à un programme de replantation de grenadille (dalbergia melanoxylon) initié par l’ONG African Blackwood Conservation Project.

www.csfi-musique.fr

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