Bâtiment

Une reprise sur fond de fracture territoriale

Le 19/05/2017
par Samira Hamiche
Depuis le début de l'année, les indicateurs sont au vert pour les entreprises du bâtiment. La reprise se confirme donc, portée par le neuf et les dispositifs incitatifs tels que la loi Pinel et le PTZ. Un bilan qui reste contrasté selon les territoires...
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La FFB organisait jeudi 18 mai son 6e Sommet de la Construction, à Paris, Salle Wagram.

La reprise se confirme dans le bâtiment ! C'est le message véhiculé à l'unisson par les intervenants du 6e Sommet de la construction, organisé le 18 mai à Paris par la Fédération française du bâtiment (FFB).

Après huit années de souffrance, l'immobilier a connu un regain d'activité, montrent les données de la FFB. Toutefois, modère l'organisation, "cette reprise en cours peine à se traduire en amélioration sensible de la situation pour les entreprises de la construction", d'autant plus que la rénovation reste à la peine (1% de croissance). Le segment du neuf, principal vecteur de croissance, s'avère lui structurellement concentré sur le territoire : 20% des communes concentrent 80% des nouvelles constructions !

Un bilan confirmé par Sandrine Pallud, commissaire aux comptes chez KPMG, pour qui "les signes de reprise sont là" : 40% des entreprises du BTP ont eu une activité positive en 2016 et 41% sont à l'équilibre, grâce notamment à l'amélioration de leur trésorerie. Côté "marché du neuf", les bailleurs ont pu financer en 2016 quelque 130 000 logements sociaux. Les collectivités locales, elles, relancent les projets autrefois gelés faute de moyens.

Le moral joue lui aussi un rôle prépondérant dans l'état de santé du bâtiment. "L'aspect psychologique joue un rôle important dans la montée des prix", et "il faut espérer que les signes de reprise se répercutent sur les PME et les ETI".

Ne pas crier "victoire"

"L'heure est à la prudence", avertit toutefois la spécialiste. Notamment concernant l'emploi... "Seuls 12% des chefs d'entreprise anticipent les embauches", un chiffre "très mince" qui incite en effet à la vigilance, même s'il subsiste une corrélation entre le niveau d'embauche et les carnets de commande, qui s'étoffent depuis l'an dernier. Plus l'entreprise est grande, plus grandes sont ses perspectives d'embauche. Les perspectives sont ainsi plus réjouissantes pour les entreprises de plus de 10 à 20 salariés, indique Sandrine Pallud.  

Principal frein à l'optimisme : la fracture territoriale. Le directeur général de l'IpsosBrice Teinturier, évoque "quatre visions différentes du monde qui s'affrontent". Olivier Salleron, président de la FFB Aquitaine, pointe lui aussi le fossé entre les métropoles et les territoires ruraux. "Il y a le réseau des départements ruraux qui souffrent, et à côté les grandes villes.

La rénovation énergétique : utopie ou réalité ?

La loi de Transition énergétique du 27 août 2015 fixe comme objectif de rénover énergétiquement 500 000 logements par an à compter de 2017 et vise 15% de baisse de la précarité énergétique d'ici 2020. Or, la moitié de ces logements est occupée par des ménages aux revenus modestes. François Pupponi, maire de Sarcelles et président de l'Anru, est formel : "la rénovation énergétique est réservée aux riches". 

Un point de vue partagé en partie par Eric Heyer, directeur du département analyse et prévision de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), pour qui "les objectifs nationaux n'ont pas de sens". Les régions, départements, collectivités locales, doivent définir leurs propres ambitions. Nicolas Hulot, nouvellement nommé ministre de la Transition écologique et solidaire, aura pour charge de pondérer ces objectifs...

Conserver les bonnes recettes

Pour soutenir la ruralité et le retour de la croissance, la FFB appelle à "ne pas casser ce qui marche", à savoir les dispositifs incitatifs tels que le CITE, le PTZ et la loi Pinel.

La suppression de ces dispositifs "équivaudrait à une double peine en particulier pour l'emploi", a ainsi souligné le président de la FFBJacques Chanut, en conclusion de ce Sommet de la Construction. "Notre premier message à la majorité qui sortira des urnes au soir du 18 juin est celui du pragmatisme : il est impératif de maintenir les dispositifs pris par la précédente majorité et qui fonctionnent", a-t-il par ailleurs confié au Monde des Artisans. "Ce sont ces outils qui permettent aujourd’hui à notre secteur de relever la tête après 9 ans de récession. L’expérience nous montre qu’il y a souvent pire que les crises financières internationales pour fragiliser l’activité, il y a surtout cet insupportable zig zag des décisions publiques. Quand ça marche, il ne faut plus y toucher", analyse ainsi le président de la FFB.

Dans la perspective des élections législatives, la FFB a par ailleurs adressé aux candidats à la députation un recueil de 112 propositions touchant au quotidien des entreprises artisanales :  apprentissage,  normes, lutte contre la fraude, droit du travail, fiscalité… Le document est consultable sur le site de la FFB.

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