Décryptage

Artisanat rural, artisanat urbain : quelle dynamique ?

Le 02/04/2019
par Samira Hamiche
Le dernier baromètre de l'Artisanat ISM-MAAF passe au crible la place des entreprises dans un référentiel territorial. Résultat : omniprésent dans "tous" les territoires, l'artisanat n'y a toutefois pas le même poids et le même visage.
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artisanat du boisA chaque territoire ses spécificités : les métiers du bois sont ainsi surreprésentés en zone rurale, tandis que les QPV accueillent de nombreuses entreprises de maçonnerie et finition du BTP.

L'étude est inédite en son genre. Pour la première fois, l'Institut supérieur des métiers (ISM) s'est penché sur la place des entreprises artisanales dans les différents types de territoires. En ruralité ou en milieu urbain, dans les quartiers prioritaires de la ville (QPV), dans les communes périphériques des grandes villes : le décryptage de l'ISM est ainsi extrêmement étoffé et riche en enseignements. 

Le baromètre ISM-MAAF passe au crible le tissu artisanal tel qu'il était connu au 1er janvier 2017 (chiffres Insee), soit 1 167 000 entreprises (1 380 000 en comptant les entreprises exerçant une activité artisanale à titre secondaire).

Des entreprises de proximité

Implantées sur l'ensemble du territoire en un "maillage très fin", les entreprises artisanales sont étroitement associées au concept de proximité, tant dans les esprits (comme le démontrait encore récemment une étude CSA-CGAD) que dans la pratique. 

L'ISM constate en effet que la part d'entreprises artisanales dans les différents territoires est proportionnelle à celle des habitants. L'artisanat concoure ainsi à un "développement économique harmonieux", note Bruno Lacoste, directeur marketing et communication MAAF.

La répartition est la suivante :

  • 38 % des entreprises artisanales sont implantées dans les grandes agglomérations (unités urbaines de plus de 200 000 habitants), dont 15 % en région parisienne ;
  • 37 % dans les unités urbaines de moins de 10 000 habitants, dont 23 % dans les communes rurales ;
  • 25 % dans les petites et moyennes agglomérations (10 000 à 199 999 habitants).

entreprises artisanales 2017

Croissance généralisée

L'étude souligne une augmentation globale du nombre d'entreprises artisanales entre 2013 et 2017 : +22 % en territoire rural, +24 % dans les villes moyennes. Cette dynamique va de pair avec une hausse du nombre d'emplois salariés en communes périphériques et villes-centre (quand une unité urbaine est constituée de plusieurs communes, la ville-centre est celle qui représente plus de 50 % de la population des communes).

"L’artisanat accompagne la dynamique de tous les types de territoires mais il y a des disparités. Si de nombreuses entreprises se créent dans les territoires ruraux, elles ont du mal à se développer et à créer de l’emploi salarié. A l’inverse, les communes périphériques des villes-centres, plus particulièrement dans l’aire urbaine de Paris, cochent toutes les cases : hausse du nombre d’entreprises et création d’emplois salariés", note précise Catherine Elie, directrice des Études et du développement économique de l’ISM.

L'artisanat de l'alimentation tire son épingle du jeu, plus favorablement en milieu urbain. Le BTP et la production ont quant à eux éprouvé plus de difficultés face à la crise.

Un rôle de taille dans l'économie rurale

Le poids des entreprises artisanales dans les zones rurales est plus marqué dans certaines régions. C'est le cas notamment de la Bourgogne-Franche-Comté (48 % d'entreprises localisées en commune rurale), de la Normandie (40 %), du Centre-Val de Loire (39 %).

L'emploi salarié de l'artisanat pèse plus lourd dans l'économie rurale : il représente 15 % des emplois du privé dans la Creuse, le Gers et la Lozère, 18 % en Corse, 13% en Haute-Saône et dans le Jura... Contre 4 % à Paris, à titre de comparaison. Toutefois, ces emplois salariés en ruralité s'avèrent plus fragiles  : entre 2013 et 2016, l'effectif a chuté de 5 %.

Autre spécificité : dans les communes rurales, les artisans s'installent davantage en nom propre (EI), tandis qu'en ville, ils optent plus fréquemment pour l'exercice en société. 

L'Artisanat très présent dans les QPV

Autre enseignement de taille : l'artisanat est également bien ancré dans les quartiers prioritaires de la ville (QPV). Près de 90 000 établissements y sont implantés, avec une densité moyenne de 170 établissements pour 10 000 habitants. Plus d'1 entreprise sur 4 basée dans les QPV est artisanale (43 %).

Le plus souvent, les entreprises artisanales y sont unipersonnelles (73 %). L'ISM note que les secteurs de la maçonnerie générale et des travaux de finition du BTP y sont surreprésentés.

L'ISM établit un "Top 3" des Quartiers accueillant le plus d’entreprises artisanales :

  • Franc Moisin, Aubervilliers (93) : 4 260 entreprises
  • Canet Arnavaux Jean Jaurès, Marseille (13) : 3370 entreprises
  • Quartier Intercommunal à Roubaix-Tourcoing (59) : 1 820 entreprises.

Une sectorisation des spécialités

De façon générale, les activités ne se répartissent pas de façon homogène sur le territoire. Le travail du bois, l'ameublement, l'extraction de pierres, la fabrication de verre ou de céramique est l'apanage des zones rurales.

Dans les villes-centres, ce sont d'autres activités qui sont surreprésentées :  textile-cuir-habillement, bijouterie, coiffure-esthétique ou encore boulangerie-pâtisserie.

Les communes périphériques des villes-centres concentrent quant à elles la majorité des entreprises de transport (taxis, VTC, déménagement), du BTP et du travail des métaux.

Action Coeur de Ville : des disparités notables 

L'ISM réalise en outre un focus sur le Plan Action Coeur de Ville. L’artisanat commercial (boulangeries, boucheries, poissonneries, coiffeurs, fleuristes, pressing, etc.) joue un rôle important dans le tissu local des emplois et dans l’animation commerciale des 222 villes du programme.

Mais toutes les villes ne sont pas à égalité en termes de densité de cet artisanat "de boutiques" : les villes les moins équipées sont celles de la couronne parisienne. En outre, on assiste à une hausse des emplois salariés dans la moitié des villes du programme, et à une baisse dans l’autre. 

>> Le compte-rendu de l'étude est disponible sur le site de l'ISM. Le baromètre complet est également disponible en téléchargement. 

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