2023, une année "dans l'ombre de l'inflation"
Immanquable rendez-vous printanier, la présentation des chiffres de L'Observatoire de la petite entreprise, piloté par la Fédération des Centres de Gestion Agréés (FCGA) en partenariat avec Banque Populaire, s'est tenue le 23 avril.
Cette étude annuelle se base sur les chiffres d'affaires d'un échantillon de 20.000 petites entreprises adhérentes de Centres de Gestion Agréés (sur un total de 230.000 entreprises affiliées), dont un grand nombre d'artisans. Elle rapporte donc des tendances empiriques, reflets de la réalité du terrain.
Net report de l'inflation sur le chiffre d'affaires
Remboursement des "dettes Covid", pénuries de matières premières et hausse des prix, envolée des tarifs de l'énergie, difficultés d'approvisionnement, conflits géopolitiques... La liste des entraves à l'activité des petites entreprises est longue.
En 2023, le PIB a péniblement atteint 0,9%, contre +2,5% en 2022, la consommation des ménages a reculé (+0,7%, +2,1% en 2022), et l’investissement des entreprises était en repli (+1,2%, +2,3% en 2022). La création d'emplois salariés, elle, plafonne à 150.000 (+0,6%), contre +349.000 en 2022.
Et pourtant, l'indicateur est au vert pour l'année 2023 : +1,5% dans l'ensemble. Un chiffre qui laisse penser que les entreprises ont pu surnager, dans un contexte économique anxiogène et défavorable.
Or, analyse la FCGA, il faut surtout y percevoir l'effet de l'inflation, qui a fait grimper les prix, et donc mécaniquement, les chiffres d'affaires. Ainsi, c'est dans les secteurs les plus impactés par la hausse des prix que les CA ont connu la plus forte progression...
L'alimentaire en hausse
Particulièrement touchés par l'inflation, les commerces alimentaires ont ainsi vu une hausse de leur chiffre d'affaires. Pour le secteur des cafés, hôtels, restaurants, elle s'établit à 6,2%, et même 7,5% pour la seule restauration. Le commerce de détail alimentaire a, lui, connu une hausse de 4,3%.
La hausse des salaires et des prix des denrées alimentaires explique en grande partie ces chiffres. À cela, il faut ajouter une tendance au retour des consommateurs vers les commerces alimentaires de proximité.
Même tendance du côté des fromagers-crémiers, dont le chiffre d'affaires a bondi de 9,1% en 2023, du fait, notamment, de la hausse du prix du lait. Pour les boulangers-pâtissiers, la hausse est de +5,2% (+0,8% en pâtisserie "pure"), et correspond au rattrapage de prix opéré à partir du 2e trimestre 2023. Pour s'en sortir face à la hausse des charges, les artisans ont en effet été contraints d'augmenter leurs prix et de revoir leurs fournisseurs.
D'autres branches ont tiré leur épingle du jeu : la vente et la réparation automobile, notamment, a connu une hausse d'activité de 4,4%. Portée par la carosserie (+11%), elle peut-être due aux réparations subséquentes aux intempéries et phénomènes climatiques de l'année 2023 (tempêtes, air chargé de sable...). À noter d'autres bon chiffres, du côté des maroquiniers (+5,7%) ou de la beauté-esthétique (+2,3%).
Le bâtiment à la peine
Dans le giron de l'Artisanat, ce sont les entreprises du bâtiment qui semblent avoir le plus souffert de l'inflation et du manque de chantiers : -1,3% sur l'année 2023.
C'est dans la plâtrerie-staff-décoration que la baisse est la plus notable : -5,5%. (après +5,6% en 2022). Traditionnellement plus dynamiques, les métiers de l'entretien-amélioration (plâtrerie, carrelage, peinture…) sont aujourd’hui fragilisés. Ces chiffres confirment la tendance déjà relevée par les organisations professionnelles du secteur, comme la Capeb.
Résilience et navigation à vue pour 2024
Le président de la FCGA, David Blanchard, salue "l’extraordinaire capacité de résilience des petites entreprises", face à "la pression financière des fournisseurs" et aux "répercussions des envolées tarifaires sur les prix de vente". "Cela a nécessité une gestion rigoureuse et beaucoup d’efforts de leur part pour maintenir la viabilité de leurs entreprises", note-t-il.
Globalement, le climat reste incertain pour les plus petites entreprises, confrontées au risque de défaillance. Les branches "dans le vert" ne sont pas nécessairement hors de danger, comme le souligne Christophe Dunoyer, président de la Commission des études économiques de la FCGA : "je crains que ces hausses ne soient pas suffisantes pour couvrir l’augmentation des salaires et des prix cette année."
En 2024, analyse la FCGA, la baisse de l’inflation pourrait cependant stimuler la consommation des ménages et stabiliser l'activité des petites entreprises. L'immobilier et le bâtiment neuf pourraient toutefois demeurer durement impactés par des conditions de financement peu favorables aux acquisitions et aux travaux de rénovation.
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