Élections dans les CMA

Dominique Métayer : "replacer l’artisanat au cœur des débats"

Le 27/09/2021
par Propos recueillis par Julie Clessienne
Depuis le début d’année, Dominique Métayer est le nouveau visage de l’U2P, qui représente 3 millions de TPE-PME issues de l’artisanat, du commerce de proximité et des professions libérales. En ligne de mire pour l’organisation professionnelle : mobiliser ses ressortissants en vue des élections aux CMA du 1er au 14 octobre. Leur slogan donne le ton : "La Voix des artisans".
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Vous avez pris la présidence de l’U2P après Laurent Munerot en janvier dernier, dans un contexte inédit. Quels sont votre projet et vos priorités pour les artisans et commerçants ?

Ma priorité : reprendre le travail important accompli dans le contexte de la crise sanitaire alors que nous commençons seulement à espérer la sortie du tunnel et accompagner les entreprises vers la reprise.

Rappelons que l’U2P a agi dès les premiers instants, notamment en étant à l’initiative du fonds de solidarité pour les travailleurs indépendants : rien n’était prévu au départ pour combler l’arrêt brutal de leur activité.

Cela a permis de soutenir un peu plus de 3 millions de chefs d’entreprise sur l’ensemble du territoire. Une bonne partie de notre tissu économique repose sur l’ensemble de ces petites entreprises !

Le Président de la République a présenté début septembre un Plan pour les indépendants, à l’occasion des Rencontres de l’U2P. Vos revendications ont-elles été entendues ?

Les mesures annoncées par le Président de la République répondent en effet aux attentes formulées par l’U2P, qui soulignait la nécessité d’apporter plusieurs axes d’amélioration pour les travailleurs indépendants :

  • Une meilleure sécurisation des travailleurs indépendants, avec la protection de leur patrimoine personnel en cas de faillite de l’entreprise. Sur ce point, l’extension de l’insaisissabilité à l’ensemble du patrimoine personnel en cas de défaillance est une excellente nouvelle pour les travailleurs indépendants.
  • Une réduction de la fiscalité lors de la transmission de l’entreprise : le nouveau plan acte à la fois pour les repreneurs d’entreprise la déduction fiscale de l’amortissement du montant de la reprise et, pour les cédants, l’augmentation des plafonds d’exonération partielle et totale des plus-values.
  • Des mesures visant à développer l’accès à la formation continue des travailleurs indépendants, tant il est vrai que se former est souvent la condition nécessaire au développement de leur activité professionnelle. Le plan prévoit ainsi de doubler le crédit d’impôts pour la formation des dirigeants d’entreprise de moins de 10 salariés.

"Les mesures annoncées sont ambitieuses et de bon sens. Elles répondent à nos demandes et nous donnent confiance en l’avenir."

Depuis 27 ans et la loi "Madelin" du 11 février 1994 relative à l'initiative et à l'entreprise individuelle, il n’y avait pas eu de texte dédié à tous les travailleurs indépendants. Ce plan constitue donc une étape historique !

Pour autant, nous regrettons que certaines mesures, notamment en matière de transmission-reprise, soient limitées dans le temps. Mais nous ne doutons pas que le débat parlementaire permettra de les pérenniser.

À l’heure où la campagne pour les élections aux chambres de métiers et de l'artisanat bat son plein, juste avant le scrutin, dans quelle mesure, comptez-vous vous appuyer, dans votre programme, sur les contributions de la plateforme participative "La Voix des artisans" que vous avez lancée en début d’année ?

L’U2P a eu la volonté d’appréhender cette échéance différemment. Au-delà des élections des CMA, tous les cinq ans, l’objectif est de créer une interactivité avec l’ensemble de nos ressortissants, grâce à cette plateforme participative.

Nous voulions avoir leur positionnement et leurs idées, à l’instant T, afin d’enrichir cette campagne.

Bien sûr, nos organisations professionnelles (OP) sont à l’écoute permanente, au quotidien, de leurs adhérents mais il nous faut trouver des dénominateurs communs, le bon discours, les messages compréhensibles par tous, y compris des politiques.

Car, au-delà des élections des CMA, cette plateforme va nous permettre d’argumenter en vue des élections présidentielles et législatives 2022.

"Concernant notre programme, notre ligne directrice est de replacer l’artisanat et les entreprises de proximité au centre des politiques publiques."

Malgré tout, et nous l’avons vu durant cette crise liée à la Covid, ces métiers sont centraux : ils font vivre notre pays, nourrissent nos concitoyens, sont à notre service au quotidien, en première ligne sur notre territoire !

Les chiffres de la participation aux élections syndicales dans les TPE sont tombés en avril dernier : 5,5%. Comment convaincre les artisans de voter pour les élections dans les CMA ? Comment les impliquer davantage ?

C’est la raison pour laquelle l’U2P a mis en œuvre cette plateforme pour impliquer et mobiliser plus largement les artisans…

"Nous nous employons à tenir compte de l’ensemble des réponses et à les traiter individuellement."

C’est la vie de leur territoire et de leur commune qui est en jeu. Il faut absolument que nous soyons acteurs de notre devenir face aux mutations qui se profilent.

Depuis plusieurs années, les CMA sont sous pression financière. Les plans se succèdent entraînant des réductions des ressources, la suppression ou le transfert de certains services… Comment faire pour revitaliser les CMA ?

Les 3.500 artisans qui seront élus connaissent bien les sujets et les problématiques parce qu’ils les vivent au quotidien. Il ne s’agit pas de participer pour participer mais vraiment de s’engager.

Ces élus doivent être un relais de ce que font les OP de leur côté afin de ne pas être en décalage avec la vie réelle. Il ne s’agit pas uniquement de gérer un établissement public administratif mais aussi se mettre au service des artisans, au plus près de leur lieu d’activité, en complémentarité avec les organisations professionnelles.

"Chaque élu est issu avant tout d’une ville ou d’un village. Ils seront donc à l’écoute de ceux qu’ils représenteront pour cinq ans."

Chacun doit faire des efforts en termes de gestion et de rationalisation mais il ne faut pas retirer des moyens là où nous en avons besoin !

Par exemple, nous avions une action forte en termes de communication avec le FNPCA (Fonds national de promotion et de communication de l’artisanat, NDLR). Supprimer cette cotisation, qui était très minime (11€ par an et par artisan), alors qu’elle a fait connaître l’artisanat comme "Première Entreprise de France" aux yeux du grand public, n’était pas pertinent.

Pour une entreprise, une saine gestion est fondamentale. De la même façon, nos collègues élus doivent être dans les CMA aussi vigilants qu’ils le sont au quotidien, d’autant qu’il s’agit d’argent "public".

Projet parfois évoqué, que pensez-vous d’un rapprochement des CCI et des CMA au sein d’une chambre économique unique ?

Les deux réseaux consulaires ont leur utilité car ils ne s’adressent pas du tout à la même typologie d’entreprises.

Même si, dans nos activités, on bénéficie parfois de la double immatriculation, en ce qui concerne l’artisanat, c’est vraiment les CMA qui ont toute légitimité.

Les CCI ont tout à fait une autre vocation. Et on peut malheureusement craindre qu’en cas de fusion, les intérêts des grandes entreprises prennent le dessus sur les intérêts des entreprises artisanales.

Nous sommes des artisans, nous avons donc cette vocation à gérer des artisans. Qui mieux que nous pour connaître leurs problématiques au quotidien, au-delà des organisations professionnelles que nous représentons ?

>> Vous souhaitez enrichir le débat ou prendre connaissance des contributions apportées à la plateforme collaborative "La Voix des artisans" ? Suivez ce lien.

Afin de respecter la parité de mise en période préélectorale, cette interview de M. Métayer réalisée en mai 2021 a bénéficié d’une mise à jour à la lumière des annonces du Plan Indépendants.

Qui sont les candidats des listes "La Voix des artisans" ?

L'U2P est composée de quatre membres, la Capeb (entreprises du bâtiment), la Cnams (entreprises de la fabrication et des services), la CGAD (entreprises alimentaires de proximité), l’UNAPL (entreprises libérales),et d’un membre associé, la CNATP (entreprises des travaux publics et du paysage). Par l’intermédiaire de ces quatre composantes, elle fédère 120 organisations professionnelles nationales.

En 2016, lors des dernières élections dans les CMA, les listes présentées par l’UPA (rebaptisée U2P la même année) étaient arrivées en tête dans 65% des départements.

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