Femmes de caractère

Elles déploient leurs ailes

Le 14/03/2018
par Marjolaine Desmartin
En 2015, la part de femmes créatrices d’entreprise s’établissait à 38 % selon le ministère des Familles, de l’Enfance et des Droits des femmes. Découvrez le portrait de trois artisanes chefs d’entreprise, volontaires et dynamiques, qui font la différence dans leur secteur d’activité.
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Nouria Nehari a toujours rêvé de créer de l'emploi. C'est chose faite avec Quartier Maro, son entreprise d'insertion.

Nouria Nehari – maroquinière : l’affaire est dans le sac

Le tour de main, Nouria Nehari ne l’a pas que pour confectionner des sacs. Cette femme de volonté a réussi à créer de l’emploi dans un secteur – la maroquinerie – qui dépérissait à Marseille (Bouches-du-Rhône). Ancienne aide médico-psychologique, Nouria décide de se lancer dans la reliure. Elle met cette période de transition à profit pour concevoir un sac sans coutures, pliable et assemblable, et ce qui deviendra son produit d’appel, le sac à géométrie variable, récompensé d’une médaille d’argent au concours Lépine en 2008. Faute de travail dans la reliure, Nouria se lance alors complètement dans la maroquinerie. "En 2005, j’ai remporté le concours régional Talents des Cités*, catégorie Émergence, qui valorise les initiatives des jeunes issus des quartiers sensibles. Cela m’a convaincue de lancer ma marque, Nehari Créations, et d’ouvrir ma boutique."

En 2014, l’artisane, qui a toujours rêvé de créer de l’emploi, se représente au concours Talents des Cités avec un nouveau projet, Quartier Maro, une entreprise d’insertion. Et remporte cette fois le prix national dans la même catégorie. "Il s’agit d’un atelier de confection de maroquinerie, installé dans l’École de la deuxième chance à Marseille, destiné à accueillir des jeunes en stage." Nouria emploie aujourd’hui deux personnes. "On a besoin de créer de l’emploi. À mon petit niveau, je prouve que c’est possible", lance celle qui se dit bouleversée par les fermetures régulières d’usines et le licenciement de nombreux salariés. L’artisane mûrit de nombreux projets : "développer une gamme pour hommes, lancer un site marchand". En attendant, ce sont les clients qui viennent vers elle du monde entier, touchés par son engagement… et par la qualité de ses créations.

* Une initiative du ministère de la Cohésion des territoires et de l’Agence France Entrepreneur, organisé par BGE, en partenariat avec la Caisse des Dépôts.

www.neharicreations.fr

Béatrice Moisson – concessionnaire et réparatrice de motos : la passion comme moteur

La moto ne devait être qu’un passe-temps pour Béatrice Moisson, diplômée en philosophie et en géopolitique. C’est finalement devenu un métier. Sans surprise, quand on écoute l’artisane. "La moto, c’est un univers de sensation. Une forme d’identité que l’on revendique, que l’on porte sur soi, même avec son casque et ses gants. C’est la singularité, la liberté, les sensations fortes. On va à la rencontre des choses et des gens." En 2011, Béatrice crée son entreprise à Crosne (Essonne), Bella Moto, spécialisée dans la vente et la rénovation. "J’aime cette relation avec les clients, provoquer des émotions." La clientèle de l’artisane ne se réduit pas aux bikers chargés de testostérone. "Il y a tous les âges, sexes et classes sociales. Les jeunes qui passent leur permis, les gens qui vont au travail avec leur moto, ceux qui ne roulent que le week-end, les néophytes et les vieux routards."

Béatrice se souvient qu’à ses débuts, les femmes se comptaient sur le doigt d’une main chez les motards. Jusqu’à ce que les marques commencent à "draguer" le beau sexe pour doper leurs ventes. "Il y a toujours des préjugés. Parfois, on me dit qu’on a croisé mon patron… Mais j’ai réussi à faire de ma singularité une force. Je pense que, pour la vente, les femmes sont plus sensibles que les hommes et mieux à même d’appréhender les réticences des clients." Béatrice a été confortée dans sa vocation par le Prix Créatrices d’avenir*, catégorie Métiers non traditionnellement féminins, reçu en 2013. Aujourd’hui, l’artisane, qui emploie trois salariés, espère consolider son entreprise. Son objectif pour l’avenir : y transmettre ses valeurs, à savoir le bien-être au travail, le management participatif et le respect de l’environnement.

* Organisé par Initiatives Île-de-France.

bellamoto.fr

Pauline Lobelson – électricienne : le courant passe

Électricienne depuis six ans suite à une reconversion, Pauline Lobelson était la seule femme de sa formation. Loin d’être échaudée, celle qui apprécie l’électricité pour son "caractère technique, manuel et un peu prise de tête" s’installe à son compte sitôt son titre professionnel en poche. "Quand on est salarié, on subit les aléas de l’état d’esprit de nos supérieurs. C’est bien plus satisfaisant d’être dirigeant !" En 2011, la jeune femme crée son entreprise, Pauline Élec, à Franconville (Val-d’Oise). Elle travaille auprès de professionnels et de particuliers, proposant dépannage, rénovation, mise aux normes, installation de chauffage et levée de réserves. Sa qualité de femme dans un monde essentiellement masculin ne l’a jamais desservi. Bien au contraire. "Il suffit de montrer que l’on est aussi compétente que les hommes", assure-t-elle.

Ajoutant : "Les particuliers sont même plus rassurés, plus en confiance. Beaucoup confient m’avoir choisie pour le nom de mon entreprise, qui montre que je suis une femme. Quand j’arrive, cela permet d’engager le dialogue. Les gens sont curieux de savoir pourquoi j’ai embrassé cette carrière. Je suis à l’aise dans la communication, loin de ce côté bourru de certains artisans."

Pauline n’a aucun salarié – "trop contraignant" – mais ne se sent pas isolée pour autant. "Nous sommes toute une bande d’électriciens qui nous entraidons et nous faisons travailler." Débordante d’énergie et d’idées, l’artisane préfère ne pas faire de projets pour son entreprise. "Qui sait, je changerai peut-être de métier demain, ou même de pays. Tout est permis!"

Facebook : paulineelec95

Les CMA encouragent l’entrepreneuriat au féminin

La CMA de l’Aube organise les Trophées de l’artisanat au féminin, qui mettent en lumière des artisanes et leur parcours dans cinq catégories : chef d’entreprise, reconversion, formation, création-reprise et métier d’homme. La chambre de métiers et de l’artisanat de région (Cmar) des Pays de la Loire encourage aussi les femmes à oser entreprendre et créer de l’emploi et de la richesse en portant le concours Entrepreneures de talent avec la délégation régionale aux Droits des femmes et à l’égalité entre les hommes et les femmes. Trois catégories ont été arrêtées : audace, jeunesse et innovation.

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