Risques professionnels

Sécurité et santé du salarié : quelle obligation pour l’employeur ?

Le 02/03/2020
par Lisiane Fricotté
En modifiant la définition de la faute inexcusable, le juge a élargi les possibilités d’engager la responsabilité de l’employeur en cas de manquement à l'obligation de sécurité de résultat. Cela a permis aussi d’améliorer l’indemnisation pour le salarié…
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Qu’est-ce qu’une faute inexcusable ?

À la base de la faute inexcusable, il y a un manquement à l’obligation de sécurité de résultat qui pèse sur l’employeur (Cass. soc., 28 février 2002, n° 99-17.201).

Preuve de la faute

Il n’y a pas de faute inexcusable si l’employeur ne pouvait avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié ou s’il avait pris les mesures nécessaires pour préserver la santé de son salarié. Dit autrement, la faute inexcusable ne se présume pas et si le salarié veut s’en prévaloir pour améliorer son indemnisation, il devra apporter la preuve de la faute de l’employeur. Il n’y a donc pas renversement de la charge de la preuve (en ce sens, Cass. 2e civ., 8 juillet 2004).

Verglas : accident du travail ou faute de l'employeur?

L’existence d’une alerte météorologique ne suffit pas pour rapporter cette preuve. Une salariée avait glissé sur une plaque de verglas sur le parking et, pour soutenir que l’employeur aurait dû avoir conscience du danger, elle faisait état d’une alerte neige verglas diffusée dans la nuit. Il s’agit bien d’un accident du travail (le parking étant assimilé à l’enceinte de travail) mais la faute inexcusable n’a pas été retenue. Il ne s’agissait pas d’une alerte de vigilance absolue (Cass. 2e civ., 25  janvier 2018, n° 16-26.384).

La faute inexcusable est présumée dans plusieurs cas :

  • Lorsqu’un salarié en contrat à durée déterminée ou intérimaire affecté à un poste présentant des risques particuliers pour sa santé ou sa sécurité, ou un stagiaire en entreprise, n’a pas reçu la formation à la sécurité renforcée prévue par le Code du travail (Cass. 2e civ., 11 octobre 2018, n° 17-23.694 ; Cass. crim., 19 février 2019, n° 18-80.942 et 19 février 2019 n° 18-81.589). Cette présomption ne peut être renversée que si l’employeur prouve qu’il a dispensé au salarié la formation renforcée à la sécurité. Par exemple, la présomption ne s’applique pas si le salarié est expérimenté, a reçu une formation adaptée et était accompagné par l’employeur pour des essais.
  • Lorsque le salarié est victime d’un accident ou d’une maladie alors que lui-même, ou un membre du CSE (comité social et économique se substituant au comité d’entreprise) avait signalé à l’employeur le risque qui s’est matérialisé dans le cadre du droit d’alerte. Dans ce cas, la présomption ne peut pas être renversée.

Exemple d’obligations : les risques psychosociaux

Pour s’exonérer de sa responsabilité, l’employeur doit apporter la preuve qu’il a pris les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs (Cass. soc., 25 novembre 2015, n° 14-24.444). En l’espèce, une salariée invoquait un stress post-traumatique, à la suite des attentats du 11 septembre 2001. Les juges ont écarté la responsabilité de l’employeur, après avoir relevé les dispositifs mis en place pour le suivi des salariés (accueil au retour de New York, consultations psychiatriques, régularité des visites auprès du médecin du travail, laps de temps important écoulé entre l’attentat et le syndrome anxio-dépressif).

Concernant le harcèlement, le fait que l’employeur ait pris toutes les mesures immédiates propres à faire cesser le harcèlement moral – ou sexuel – et qu’il ait fait cesser effectivement les agissements est nécessaire mais ne suffit pas pour considérer qu’il n’y a pas manquement. Il faut que l’employeur ait pris toutes les mesures de prévention (visées aux articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du Code du travail) et notamment qu’il ait mis en œuvre des actions d’information et de formation propres à prévenir la survenance de faits de harcèlement moral. Introduire dans le règlement intérieur une procédure d’alerte n’a pas été considéré comme suffisant (Cass. soc., 1er juin 2016, n° 14-19.702).

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