Politique

Gouvernement Philippe : les réactions des acteurs de l’artisanat

Le 19/05/2017
par Samira Hamiche
Nommé le 17 mai, le nouveau gouvernement conduit par le Premier ministre Edouard Philippe ne comporte pas de portefeuille ministériel spécialement dédié à l’artisanat. Malgré un fond d'inquiétude, les organisations professionnelles comptent sur la bienveillance des ministères de tutelle (Economie et Travail notamment) pour porter leurs projets.
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Matignon, siège du Premier ministre

L’artisanat serait-il le grand oublié du nouveau gouvernement “resserré” d’Edouard Philippe ? L’annonce, faite mercredi dernier, d’une équipe sans ministre ni secrétaire d’Etat à l’Artisanat, a dans un premier temps déçu les acteurs du secteur, malgré tout prêts à travailler de concert avec les nouvelles figures du gouvernement.

Pour Bernard Stalter, le président de l’Assemblée permanente des Chambres de métiers et de l’artisanat (APCMA), cette décision est regrettable, “à l’heure où la France et tout particulièrement ses entreprises ont besoin d’un signal fort”.  “C’est oublier que l’ensemble de nos territoires vivent aussi grâce aux 1,3 million d’artisans qui apportent aux régions attractivité et cohésion sociale” et “que l’artisanat est une force économique en mesure d’offrir des solutions réelles à la lutte contre le chômage en France”, dénonce celui qui s’est fait le héraut de l’artisanat durant la campagne présidentielle. Il évoque en outre l’apprentissage, lui aussi orphelin de ministère, en rappelant l’importance de ce modèle “qui a fait ses preuves et permet de répondre aux besoins concrets des entreprises”.

Bernard Stalter se montre néanmoins optimiste et “espère que le secteur trouvera à nouveau sa juste place dans les aménagements futurs qui seront portés à la composition du gouvernement”.

Qu’importe le flacon...

Du côté de l’Union des entreprises de proximité (U2P), l’heure est à la déception, mais pas question de dramatiser. Ainsi, d’après Alain Griset, président de l’organisation, l’absence de ministère de l’Artisanat pose davantage un problème de communication que de gestion des affaires. “On ne peut pas dire que ce soit un bon signe mais il faut relativiser les choses”, confie-t-il ainsi au Monde des Artisans. “Nous avons quelquefois eu des secrétaires d’Etat ou des ministres et ce n’est pas pour autant que les choses ont beaucoup avancé”, pondère le président de l’U2P. “Nous aurions préféré qu’il y ait un ministre ou un secrétaire d’Etat en charge de notre secteur, car il le mérite au regard de ce qu’il peut apporter au pays. Mais ce n’est pas pour autant qu’il n’y aura pas dans les attributions d’un ministre les compétences qui nous concernent et derrière la possibilité de travailler dans de bonnes conditions”, analyse-t-il. “C’est une question de visibilité, de message, mais cela peut ne pas remettre en cause l’efficacité des mesures qui vont être prises”.

Face à la fracture territoriale, leitmotiv de la campagne présidentielle, “personne n’a intérêt à reléguer l’artisanat au second plan”, rassure Alain Griset, qui “n’imagine pas que le président actuel puisse l’envisager”. “Sur les territoires, ce sont nos entreprises qui créent de l’emploi, du lien social”, rappelle-t-il.  Concernant l’apprentissage, l’U2P “va regarder très attentivement dans les prochaines heures comment les périmètres ministériels vont être définis”. “C’est seulement à ce moment-là qu’on pourra mesurer la volonté du gouvernement de faire de l’apprentissage une vraie cause nationale”.  

Les PME sur le qui-vive

La Confédération des Petites et moyennes entreprises (CPME) se montre très mesurée et préfère rappeler ses priorités au gouvernement. Dans un communiqué diffusé sur son site, l’organisation “souhaite plein succès” à la nouvelle équipe. “Les chefs d'entreprise souhaitent maintenant que se concrétise rapidement la volonté de réformes exprimée durant la campagne”, indique la CPME. La réforme du code du travail, le RSI, “la simplification des règles et normes qui brident l'initiative”, la prévention de la pénibilité ou le prélèvement à la source sont autant de sujets sensibles pour la confédération.

La CPME plébiscite en outre “une Loi-cadre TPE/PME retraçant les orientations de la 'politique entreprise' que le gouvernement entend mener durant le quinquennat”. François Asselin, président de la CPME, doit bientôt rencontrer les ministres pour leur faire part des attentes de “la France qui se lève tôt” : "artisans, TPE-PME, professionnels du logement, du commerce ou du tourisme."

Quid du bâtiment ?

Au croisement de plusieurs ministères, le bâtiment se retrouve principalement lié aux portefeuilles de l’Economie (Bruno Le Maire), de la Cohésion des territoires (Richard Ferrand) et de la Transition écologique (Nicolas Hulot). Cette diversité n’inquiète pas les organisations professionnelles, enthousiastes à l’idée d’avoir de nombreux interlocuteurs.

“Au nom des artisans du bâtiment, j’adresse mes vœux de succès au gouvernement d’Edouard Philippe pour reconstruire et consolider les efforts de toute une nation”, félicite Patrick Liébus, le président de la Capeb. “Je souhaite courage et détermination à ce nouveau gouvernement ! Je veux croire qu’il aura à coeur de s’appuyer sur l’économie de proximité pour relancer la France”, ajoute-t-il.

Du côté de la Fédération française du bâtiment (FFB), l’étiquette des ministères compte peu. “Au-delà de l’intitulé des ministères, ce qui compte est avant tout la politique suivie”, nous a ainsi livré Jacques Chanut, le président de la FFB. “En 2012, le premier Gouvernement Ayrault avait dédoublé le ministre de l’Artisanat et celui des PME : cette profusion des intitulés n’était pas plus propice à la lisibilité… Ce qui nous importe est que les enjeux artisanaux soient bien pris en compte à Bercy”, résume-t-il. Jacques Chanut a toute confiance en Bruno Le Maire, le nouveau ministre de l’Economie. “C’est quelqu’un que nous connaissons bien, avec lequel la FFB a eu l’occasion de travailler à plusieurs reprises, notamment sur la question du RSI et de ses dérives”, rappelle le président de la FFB.

L’organisation retient plusieurs points de vigilance et sera attentive “au maintien des qualifications artisanales” et “à l’indispensable équilibre entre micro-entrepreneurs et artisans”, pour que le régime de la micro-entreprise “redevienne un tremplin vers l’artisanat”. Elle met aussi un point d'orgue à protéger le dispositif Pinel, le PTZ renforcé et le CITE, synonymes de croissance pour le bâtiment. 

Les acteurs du bâtiment travailleront étroitement avec Richard Ferrand, ministre de la Cohésion territoriale, qui a hérité des dossiers liés au logement. “Cette mise en relation de la cohésion territoriale et du logement porte une vraie cohérence”, salue ainsi Jacques Chanut. 

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