Etude

Artisans du bâtiment : la santé n'est pas au rendez-vous

Le 18/05/2018
par lemondedesartisans.fr
Selon le dernier baromètre ARTI Santé BTP, l’état de santé des dirigeants d’entreprise artisanale du bâtiment s’est profondément détérioré : près de 4 artisans sur 10 estiment être en mauvaise santé. Le rythme de travail, les délais ou les charges administratives engendrent beaucoup stress. En outre, le suivi médical reste insuffisant chez les plus jeunes.
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Les artisans du bâtiment ne tiennent pas la forme. Publié le 15 mai dernier, le 4e baromètre ARTI Santé BTP de la Capeb, de la CNATP, et du pôle d’innovation IRIS-ST fait état d'un tableau peu réjouissant des conditions de travail et de la santé des artisans du BTP. 

La reprise a un coût...

En 2017, le secteur du BTP a connu une reprise, que les artisans confirment eux-mêmes : ils sont 60% à avoir observé une progression de leur activité en 2017 et 50% se disent confiants vis-à-vis de l’avenir de leur activité (contre 30% en 2016). En outre, les sondés se sentent moins isolés (35% seulement, contre 40% en 2016).

Ce redémarrage de l'activité va de pair avec une détérioration de la santé des artisans. Ainsi, en 2017, 39% d'entre eux se sont dit "en mauvaise santé". Cette détérioration nette (10 points en un an) est imputable à des rythmes de travail très intenses, des charges administratives importantes et des contraintes de délais, générateurs de stress

Près de 7 chefs d'entreprise artisanale du BTP sur 10 (68 %) déclarent souffrir de douleurs musculaires, un chiffre en baisse (-10 % depuis 2015), toutefois, du fait de l'adaptation constante de la manière de travailler. Plus d'1 artisan sur 2 (52 %) souffre de fatigue importante (contre 50% en 2016) et de troubles émotionnels : 24% éprouvent de la nervosité, de l’irritabilité et des angoisses (23% en 2016).

Patrick Liébus, président de la Capeb, parle de "phénomène de 'contre coup' lié au redémarrage de l’activité". "Il faut reconstituer la trésorerie et les marges ne sont pas encore significatives. A cela s’ajoute la difficulté de recrutement de personnel qualifié pour assurer les chantiers. Les artisans sont ainsi stressés et surmenés, ce qui se répercute sur leur vie personnelle et leur hygiène de vie", commente-t-il par ailleurs.

Un rythme effréné

Autre corollaire au redémarrage de l'activité : les artisans ne comptent plus leurs heures ! Ils sont 63 % à travailler plus de 50 heures par semaine, dont 24 % plus de 60 heures. Près d'1 artisan sur 2 (47 %) arrive toutefois à garder du temps pour une activité extraprofessionnelle.

Plus les dirigeants ont de salariés, plus ils travaillent. L'écart est encore plus marqué à compter de 6 salariés. Les dirigeants de 6 à 10 salariés, de 11 à 15 et de 16 à 20 salariés sont respectivement 36%, 41% et 52% à travailler plus de 60 heures par semaines ; contre 19% pour les dirigeants travaillant seuls. Toutefois, ils peuvent plus facilement s'accorder des congés que les artisans n’ayant pas de salariés ou de 1 à 5 salariés. 

"En plus de devoir absorber le redémarrage de l’activité et les contraintes liées aux difficultés de recruter du personnel qualifié, nous devons assumer la charge de démarches administratives lourdes, ce qui ajoute au stress", rappelle Françoise Despret. La présidente de la Chambre nationale de l'artisanat, des travaux publics et paysagistes (CNATP) espère que cette étude sera "un déclic pour les pouvoirs publics afin qu’ils orientent leurs politiques vers un allègement notable de la charge administrative des petites entreprises." 

Du stress au surmenage

Quelque 58% des chefs d'entreprise du BTP déclarent qu’ils sont souvent, voire très souvent stressés. Les causes du malaise sont liées à une routine pressurisante : les démarches administratives, la charge de travail, les contraintes de délais et le manque de repos jouent ainsi pour beaucoup.

Conséquence : un sommeil de piètre qualité, qui accroît le risque d’épuisement professionnel : près de 4 artisans sur 10 (37 %) ont ainsi frôlé le burn-out en 2017. 

"La charge administrative excessive pèse lourdement sur les artisans du BTP et occasionne un stress toxique", alerte Patrick Liébus, qui appelle les pouvoirs publics à un "électrochoc", "un choc de simplification". "Il est urgent et essentiel d’alléger cet aspect de leur quotidien, au lieu de quoi, on veut leur imposer de nouvelles tâches telles que le prélèvement de l’impôt à la source". La Capeb, qui fait partie de l'Union des entreprises de proximité (U2P), milite en effet pour une modification des modalités du PAS, jugées trop lourdes pour les chefs d'entreprise.

Une prévention à améliorer

Les artisans du bâtiment souffrent d'un suivi médical insuffisant. Seuls 13% d'entre eux sont suivis dans le cadre de leur activité professionnelle et 51% d’entre d’eux ne consultent leur médecin généraliste qu'à de très rares occasions ou jamais. Chez les moins de 31 ans, seuls 25% consultent un médecin. 27 % d'entre eux invoquent le manque de temps et 13 % disent ne pas en ressentir le besoin (13%).

Les organismes à l'origine de l'étude plaident pour une meilleure sensibilisation à la prévention des risques de santé, afin de mieux traiter des pathologies pouvant être décelées et freinées par anticipation.

"Nous défendons le principe d’un suivi régulier, annuel et pris en charge pour les chefs d’entreprise artisanale du bâtiment. Puisque le RSI est entré dans le régime général de sécurité sociale, la question doit être sérieusement étudiée. Les résultats inquiétants de ce baromètre doivent servir de base pour initier des actions en conséquence", espère ainsi le président de la Capeb.

www.capeb.fr

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