Reconnaissance

Une prof du CFA de Rouen dans le Top 10 mondial !

Le 05/11/2021
par Propos recueillis par Julie Clessienne
Le CFA Simone-Veil de Rouen peut s’enorgueillir d’avoir dans ses rangs l’une des dix meilleurs professeurs du Monde ! Juline Anquetin-Rault, 36 ans, incite ses élèves à travailler ses cours d’histoire-géographie en autonomie, à l'aide d'outils numériques. Une pédagogie qui lui vaut d’être dans le Top 10 du Global Teacher Prize, équivalent du Prix Nobel pour les enseignants. À quelques jours du résultat final, retour sur son parcours et sa méthode…
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Pourriez-vous nous retracer votre parcours professionnel ?

Mes études ont abouti à l’obtention d’un master d'histoire et j’ai toujours eu une grande passion pour la pédagogie.

J'ai démarré ma carrière au lycée du sport d'Évreux, en tant que professeur d'histoire-géographie, de mathématiques et de management. Puis j’ai poursuivi dans de petits lycées privés à Paris, toujours en tant que professeur d'histoire-géographie, de méthodologie également.

Depuis 6 ans, j'enseigne au CFA de Rouen. En parallèle, j’ai également lancé il y a 12 ans en auto-entreprise une agence de soutien scolaire qui forme 70 élèves par an environ, de la 6e à la terminale, en français, philosophie, maths, histoire et géographie.

Qu’est-ce que la voie de l’apprentissage symbolise pour vous ? Est-ce très différent de la voie générale pour un professeur ?

C'est différent, c'est sûr, mais pas tant que cela ! En fait, ce qui les différencie, c’est que ces élèves ont souvent trouvé leur voie et que l'apprentissage leur redonne confiance en eux.

"Ce que j'aime, c'est de me sentir vraiment utile auprès de mes apprentis. C’est un vrai challenge pour moi que de les intéresser à une matière générale, comme l’histoire-géographie, qu'ils n’apprécient pas forcément à la base."

Dans ce CFA, j’ai aussi la liberté de pouvoir mener des projets en partenariat avec les professeurs de pratique comme des Journées européennes, italiennes ou irlandaises cette année, et de mêler les enseignements "métiers" à l'histoire-géographie.

Vous utilisez une méthode pédagogique originale : la classe autonome. Pouvez-vous nous en expliquer le principe ? 

Le principe de la classe autonome est simple. Il se déroule en 3 temps :

  • un cours classique de 20 minutes ;
  • un temps de vérification avec des quiz sur téléphone ;
  • le temps des ateliers en autonomie lors desquels les élèves bougent, travaillent à leur rythme, ensemble ou seuls, en organisant le temps et en se servant du matériel créé par le professeur (flashcards – "fiches de mémorisation" –, mindmap – ou "carte mentale"–, casque de réalité virtuelle, film à regarder, quiz sur téléphone, puzzle, études de documents, recherches…).

"Ils adorent ce concept ! Un sondage anonyme lancé en début d'année auprès des élèves arrivés en septembre a prouvé que 86% d’entre eux avaient l'impression de mieux apprendre avec cette technique et aucun élève ne déclare se sentir mal dans la classe."

Vous faites partie du Top 10 mondial du Global Teacher Prize, sur les 8.000 candidats en lice ! Expliquez-nous ce que représente ce concours et ce que nécessitait votre dossier de candidature ?

Le Global Teacher Prize est l'équivalent du Prix Nobel pour les enseignants, mais n’est absolument pas un jugement sur le ou la meilleure professeur du Monde ! C'est juste une reconnaissance d'un travail, de ce qu'on apporte à notre profession.

J'ai connu ce prix grâce à Patrick Souala, qui enseigne dans la région de Nice, et qui a fait lui-même parti du Top 50 en 2017.

Le dossier de candidature nécessitait de réunir de nombreuses pièces : des lettres de recommandation, des vidéos et photos de notre travail, la liste de ce qu'on a mis en place pendant le confinement…

Et de répondre à des critères exigeants : démontrer que notre pratique pédagogique est efficace, innovante, reproductible et évolutive, avec des résultats probants, son impact au-delà du cadre purement scolaire…

Les candidats sont sélectionnés par une "Académie des juges" composée de professeurs, d'experts en pédagogie, de journalistes, d'entrepreneurs dans le domaine de la technologie, de chefs d'entreprise et de scientifiques du monde entier.

Ils sont chargés d’étudier les dossiers de candidature mais aussi les pages Instagram, Youtube, Facebook que nous alimentons dans le cadre professionnel.

Les candidats passent ensuite un entretien en visio, afin d’expliquer leur parcours, leurs valeurs et leur motivation.

Est-ce rare qu’un professeur de CFA ou d’une filière "professionnalisante" soit parmi les finalistes ? 

Non, ce n'est pas si rare. Patrick Souala enseigne justement en lycée professionnel.

Les professeurs de la voie professionnelle sont souvent confrontés à de nombreux challenges et à un public d’élèves particulier, qui nous oblige à repenser notre pédagogie.

Pour le finaliste, la dotation est d’un million de dollars et la visibilité sera mondiale. Comment on appréhende un tel enjeu ? Cela donne-t-il envie de retraite dorée, malgré votre jeune âge ?

Absolument pas ! Mon métier, c'est ma passion et toute ma vie. Cet argent servira à développer la formation à la classe autonome dans un centre de formation pour enseignants, mais aussi mon agence de soutien scolaire.

10% iront également à l'association des élèves que j'ai créée avec mes apprentis pour financer des voyages scolaires pendant les 20 prochaines années.

J'aimerais aussi inviter à Paris les finalistes pour une rencontre pédagogique.

>> Pour en savoir plus sur ce concours : www.globalteacherprize.org

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