L'artisanat du bâtiment repart... prudemment
Le ciel continue de se dégager pour les artisans du bâtiment. Selon les chiffres présentés par la Capeb mardi 17 octobre, l'activité globale des entreprises artisanales du bâtiment a connu une hausse notable de +2,5% au 3e trimestre 2017.
Ce chiffre marque une consolidation de la croissance dans le secteur, qui a progressivement sorti la tête de l'eau depuis la fin 2016. En projection, la Capeb prévoit entre +2,5% et 3% de hausse globale de l'activité sur l'année.
Le redémarrage de l'activité concerne tout le territoire métropolitain, avec quelques disparités selon les régions.
Le neuf en forme, l'ancien se retape
Cette reprise est portée par le neuf, dont l'activité s'établit à +5%, soit son plus haut niveau depuis 5 ans. Corollaire de ce bon résultat : en comparaison avec le T3 2016, les autorisations de construire ont bondi, pour s'établir à +15,2% (soit 499 500 logements). Même logique pour les mises en chantier effectives : +17,1% (411 300).
Dans l'ancien (entretien-amélioration), l'activité est moins marquée, mais reste dans le vert : +1%. Les artisans ont surtout été sollicités pour des travaux d'amélioration de performance énergétique (+2,5%). Les entreprises "en second homme", comme celles de la couverture plomberie chauffage ou de l'électricité ont de fait connu une hausse d'activité.
Ces chiffres sont notamment liés au bond de la vente de logements anciens : +13% sur an. Cela représente 931 000 logements vendus entre juillet 2016 et 2017 ! "Un record historique", a noté Patrick Liébus, le président de la Capeb. "Cela montre bien la nécessité des mesures incitatives : sans les aides, l'entretien-rénovation n'aurait jamais atteint ces chiffres", a-t-il analysé.
Les petites entreprises ré-embauchent
En un an, ce sont 8600 postes qui ont été créés dans le bâtiment. Les entreprises de moins de 20 salariés ont montré un petit regain de confiance. Selon les données de la Capeb, l'emploi salarié dans ces entreprises a ainsi augmenté de 0,9% entre le T2 2016 et le T2 2017.
Pour la seconde fois depuis deux ans, le nombre d’entreprises souhaitant embaucher en janvier 2017 est supérieur au nombre d’entreprises envisageant de licencier ou de ne pas renouveler des contrats. Ainsi, plus de 8 entreprises sur 10 (88%) prévoient de maintenir l’emploi à son niveau actuel au premier semestre 2017 et 12% des chefs d’entreprise pensent embaucher des salariés supplémentaires (contre 7 % en 2016).
Préserver l'écosystème des artisans
Malgré ce sursaut, Patrick Liébus relativise : "globalement, le taux de chômage reste le même et on ne redémarre pas forcément au niveau des emplois". "Quand on économise de l'argent sur notre secteur, on ne crée pas d'emploi", dénonce le président de la Capeb.
Preuve que l'incertitude des lendemains plane toujours sur le bâtiment, l'organisation a noté un léger ralentissement de l'activité par rapport au dernier trimestre : la visibilité des carnets de commande s'établit à 90 jours, contre 94 en juillet 2017. "4 jours de chantier, pour un artisan, c'est beaucoup", rappelle Patrick Liébus.
Le président de la Capeb se veut ferme et appelle Bercy à "maintenir les conditions de cette progression". "Les décisions politiques doivent être à la hauteur de ce qu'on recherche". Taux bas, reconduction des dispositifs incitatifs tels que le PTZ, l'éco PTZ ou le Pinel : la Capeb sera intransigeante avec le gouvernement concernant les "mesures de bon sens".
Quid du CITE ?
Le 27 septembre dernier, le couperêt est tombé : le gouvernement a annoncé la suppression du CITE, avec effet immédiat, pour les travaux de rénovation de chaudières à fioul, fenêtres, volets et portes. Une mesure qui a pourtant permis aux ménages modestes de rénover et aux professionnels de relancer leur activité. Tollé dans le monde du bâtiment.
Pris au dépourvu, Patrick Liébus ne décolère pas. "C'était incompréhensible... alors j'ai réagi immédiatement. La Capeb était mobilisée dès le premier jour", souligne le président de la Capeb, qui a fait part de son étonnement auprès de la présidence de la République et des cabinets ministériels concernés. "Je ne sais pas qui a pu avoir une telle idée", ironise Patrick Liébus, qui fustige l'esprit "technocratique" de Bercy et une "prise de mesures qui inverse le processus de croissance".
"Après de multiples interventions et un débat au parlement, nous avons vu disparaître l'effet rétroactif", pose Patrick Liébus, qui espère renverser la vapeur en prolongeant le CITE jusqu'à fin 2018. Ce combat, précise-il, il le mène de concert avec son homologue de la Fédération française du bâtiment (FFB), Jacques Chanut. "Si on porte la voix d'une façon commune, l'entente sera différente", espère Patrick Liébus, qui suit "avec beaucoup de vigilance" les arbitrages en cours.
Autre point noir : le plan logement du gouvernement. La Capeb regrette la baisse des APL et la baisse simultanée des loyers demandée aux offices HLM. Selon l'organisation, ce mécanisme est susceptible d'engendrer des "conséquences perverses" sur les ménages à faibles ressources, dont les dossiers pourraient être encore moins avantagés. Patrick Liébus se dit "solidaire de ceux qui gèrent ces offices avec intelligence" et appelle le gouvernement, dont "certaines idées sont socialement bonnes", à moins de maladresse.
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