Trait d'union

Trois artisans tout simplement uniques !

Le 04/10/2023
par Isabelle Flayeux
Derniers détenteurs d’un savoir-faire d’exception, trois artisans s’investissent pleinement dans une activité de niche. Chacun accomplit au quotidien des gestes de précision et des techniques exigeant des années de pratique pour être parfaitement maîtrisés. Tous confient vouloir partager et transmettre un métier qu’ils aimeraient voir se pérenniser…
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Alain Sauter travaille en collaboration avec la graphiste Cécile Blary pour créer, de A à Z, des globes terrestres.

Alain Sauter, fabricant de globes terrestres : quand faire des ronds exige d’être carré

"Tout commence par la confection selon une méthode traditionnelle de deux demi-sphères parfaites avec une âme en staff. Si le geste semble simple, il est technique et d’une extrême précision, au demi-millimètre près." 

Alors qu’il prépare un cours de cartographie, Alain Sauter, enseignant chercheur en géographie, réalise la disparition en France du métier de fabricant de globes terrestres. "Je me suis alors lancé, par curiosité." 

L’essai se transforme en passion dévorante et obsessionnelle, rythmée par des recherches bibliographiques, des échanges avec une restauratrice de globes et un nombre incalculable de tests pour trouver les matériaux adaptés, se perfectionner à l’aquarelle...

"Très peu de gens disposent encore de ce savoir-faire qui fait appel à plusieurs métiers et personne ne sait faire un globe du début à la fin." 

Avec la graphiste Cécile Blary, à ses côtés depuis 2019, l’artisan dispose de plusieurs fonds de carte de leur création et personnalise chaque globe selon son calibre et l’envie du client.

"La carte imprimée est découpée en 12 fuseaux de 30 degrés de manière à faire un tour du monde. L’étape la plus délicate, le collage, précède la mise en couleur à l’aquarelle, avec des dégradés et ombrages quasiment impossibles à obtenir avec des techniques numériques pures." 

L’atelier de Besançon (25) se transforme ensuite en ébénisterie le temps de concevoir, dessiner et réaliser les supports de globes.

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Patrick Brassac, potier d’étain : une douzaine de métiers en un

Ils étaient 200 dans les années 80. Patrick Brassac est aujourd’hui le seul potier d’étain en France. Installé à Bourg-de-Péage (26), l’artisan de 58 ans représente la sixième génération à perpétuer un savoir-faire ancestral.

"Enfant, j’observais les gestes de mon père et je participais à quelques tâches dans l’atelier derrière la maison. Quand je l’ai rejoint à 18 ans, je savais déjà comment travailler l’étain." 

Épaulé par son épouse Maggie, Patrick Brassac exerce une douzaine de corps de métiers pour créer des objets en étain, un métal alimentaire marié à de l’antimoine et du cuivre, à hauteur de 3%.

"Partir du matériau brut pour arriver au produit fini exige la maîtrise de différentes étapes comme la création, la confection de moule, la fonderie, la soudure, le polissage…" 

Confronté à la désaffection des Français pour l’étain, le couple s’est tourné vers les marchés étrangers. L’export représente 80% du chiffre d’affaires de l’entreprise aux 850 références et à la diversification continue.

"Aux soupières et pichets d’antan, les gens préfèrent les petits articles comme les porte-couteaux, les bouchons à vin et les accessoires pour l’écriture. Le prix de l’étain ayant triplé depuis la crise sanitaire, nos produits sont considérés comme des produits de luxe." 

Même s’il ne recherche pas encore activement un repreneur, Patrick Brassac aspire à transmettre son métier dont le savoir-faire si diversifié s’acquiert sur quatre à cinq ans.

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Alain Soucille, fabricant de pierres naturelles d’aiguisage : de la carrière à l’atelier

Alain Soucille confectionne des polissoirs en cuir de buffle dans l’entreprise artisanale de son père à Thiers (63) quand il apprend que le dernier fabricant de pierres à faux naturelles cherche un repreneur.

Aujourd’hui, des pierres à aiguiser naturelles pour l’affutage des couteaux, des outils à bois, des sécateurs, des faux et quelques limes à ongles en pierre issue du même filon sortent de l’atelier de Saurat (09) repris par l’artisan en 2006.

"Les deux employés sont restés et m’ont montré leur façon de procéder à la carrière et à l’atelier depuis 35 ans." 

Secondé par sa fille au bureau, l’artisan de 64 ans exploite l’une des plus petites carrières de France en Ariège, avec son collègue de 69 ans. Au cours d’une année d’exploitation normale, le duo extrait jusqu’à 30 tonnes de schiste et fabrique plus de 70.000 pierres à aiguiser.

"On profite des beaux jours d’avril à octobre pour se rendre au filon car l’endroit est pentu et glissant."

Malgré la pénibilité, Alain Soucille reste passionné par la transformation d’un matériau brut en produit d’usage durable et de qualité, et confie n’envisager une transmission qu’après 2025.

"Le plus compliqué est d’apprendre à exploiter le filon. Les gestes de l’atelier s’acquièrent assez facilement. Il faut savoir couper les pierres dans le bon sens, en intégrer certaines à des socles en bois mais la plupart s’utilisent simplement, à la main, ou posée sur un plan de travail."

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